Circulaire/FAQ — quelle valeur légale ?

par editeur en Contrôle fiscal Juridique publié le 13 août 2018
0

Un sujet qui peut paraître très technique et juridique, mais cela peut rester une carte à jouer à certains moments d’un contrôle.

Comme vous le savez, le Code d’impôts sur les revenus est une législation modifiée et constituée par des lois. C’est le législateur via des votes au Parlement qui les valide. C’est donc une décision démocratique basée sur une réflexion démocratique (motifs de la loi) et des amendements sont possibles. Pour certaines lois, des nuits ont été passées en débat.

C’est donc bien la loi qui est le garant de l’égalité des Belges (et la cour Constitutionnelle pour la faire respecter).

Il y a ensuite les Arrêtés royaux qui sont une compétence déléguée par la loi votée afin de permettre au Roi de directement préciser certaines modalités d’application, conditions ou montants.

L’Administration vient contrôler la juste application de la loi fiscale dans les dossiers des contribuables/assujettis.

Afin de clarifier certains points/articles qui sont parfois assez indigestes à la lecture, l’Administration a rédigé des circulaires. Ces circulaires sont donc des explications de la part de l’organe en charge de la vérification sur sa compréhension du texte, sa tolérance pour « relativiser » un texte, mais aussi pour informer et préciser sa pensée.

Depuis peu, l’administration utilise également un système de « FAQ » afin de répondre aux questions types les plus fréquentes sur des points spécifiques. Les plus célèbres sont les FAQ pour les avantages véhicules, la franchise TVA ou le Tax Shelter. Ces FAQ sont donc une manière d’être plus proches et plus pratiques/transparents avec les administrés.

Ces circulaires/FAQ engagent donc l’Administration a respecter ce qu’elle dit et annonce. On verrait assez mal un fonctionnaire aller à l’encontre d’une circulaire ou l’Administration explique sa perception tolérante sur un point particulier.

L’inverse est-il vrai ? Faut-il se soumettre aux circulaires et aux FAQ ? Comme vous l’aurez compris en lisant, les circulaires et les FAQ ne sont pas la loi. Ce sont des explications unilatérales de la part de l’Administration fiscale.

Dans un arrêt du 20.09.2006, la Cour d’appel de Bruxelles a conclu à l’absence de valeur légale de la circulaire du 08.08.1983 relative au régime spécial applicable pour la régularisation de la situation fiscale de certains cadres étrangers.

La Cour indique que « l’article 51 du CIR ne permet pas à l’administration de prévoir des privilèges en faveur de certaines catégories de contribuables, qui pourraient alors bénéficier d’un forfait complémentaire de frais professionnels sans devoir dès lors apporter la preuve de la réalité et du montant de ces frais, comme prévu par l’article 44 du CIR/64 (article 49 du CIR/92). Les circulaires administratives en général, et la circulaire du 8 août 1983 en particulier, n’ont aucune valeur légale et ne lient ainsi pas les cours et tribunaux, ce que l’administration admet elle-même en termes de conclusions. »

Encore très récemment, le Conseil d’État (15e chambre, référé — Arrêt du 20 juin 2018 — Rôle n° 241.840) a jugé que l’acte attaqué (le commentaire de l’article 194ter, § 1er, alinéa 1er, 9° du Code des impôts sur les revenus 1992 relatif au régime tax shelter pour la production audiovisuelle et à la commission des intermédiaires, qui a été publié, le 25 janvier 2018, sous la forme d’une « question fréquemment posée » sur le site internet Fisconetplus du SPF Finances) ajoute bien une condition à l’article 194ter, § 1er, alinéa 1er, 9°, du CIR 92, et méconnaît l’article 170 de la Constitution. La FAQ ajoute une condition à la réglementation applicable et constitue bien un acte attaquable devant le Conseil d’État.

Bref, toute la nuance est de savoir si la circulaire ou la FAQ ajoute une condition à la loi. Si oui, la circulaire est attaquable et potentiellement illégale.

De la même manière, en cas de contrôle, on ne peut pas justifier un rejet sur base d’une circulaire sur le même principe. C’est la loi qui doit être appliquée.

Maintenant, je ne vous cache pas que comme toutes les armes puissantes, il faut savoir les utiliser avec parcimonie, car vous avez devant vous une personne qui croit parfois à tort certaines choses. Une bonne discussion au calme vaut cent fois mieux qu’une dispute juridique sur la force de la circulaire. Un seul mot en cas de contrôle : diplomatie. Si la diplomatie ne fonctionne pas, il sera toujours temps de sortir l’artillerie lourde… mais c’est une autre histoire.

Partager l'article

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *